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Pour éclairer les articles de Rosa Luxemburg sur la question d'orient, Loannis Loucas, La question d'orient et la géopolitique de l'espace européen".

 

 La question d'orient et la géopolitique de l'espace européen du sud-est

 Loannis Loucas - Dans Guerres mondiales et conflits contemporains 2005/

https://www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2005-1-page-17.htm

I. L’APPROCHE GÉOPOLITIQUE DE LA QUESTION D’ORIENT

Du point de vue de l’approche géopolitique, l’espace balkanique fut cette région du monde qui servit de champ de matérialisation de ce processus historique complexe que le chancelier de l’Empire austro-hongrois, le prince Metternich, appela, dès l’émancipation nationale des Grecs contre l’Empire ottoman (1821-1829), « Question d’Orient »  [2]

Si, depuis l’ouvrage d’Édouard Driault [3] l’histoire diplomatique considère que la Question d’Orient est le conflit entre les grandes puissances et les nations du Sud-Est européen pour le partage territorial de l’Empire ottoman (auquel mirent fin la proclamation de la fin de l’Empire ottoman et la création de la République turque par Mustafa Kemal Ataturk en 1923 [4]il n’en va pas de même pour l’approche géopolitique. Bien que bon nombre des représentants de la géopolitique en France actuelle s’inscrivent dans la ligne de Driault, reprenant dans leurs manuels géopolitiques sa définition historique « romantique » de la Question d’Orient, celle-ci est à bon droit définie autrement tant par des géopoliticiens, tel sir Halford Mackinder, que par des historiens qui tiennent compte des données géostratégiques de la question, tel P. Waltz. Selon l’approche géopolitique donc, la Question d’Orient n’est pas, par exemple, « le subtil équilibre entre l’intégrité et le partage de l’Empire ottoman » comme nous le lisons dans le Dictionnaire de géopolitique d’Yves Lacoste [5]mais bien la lutte entre les puissances navales occidentales et les puissances continentales nordiques et/ou orientales, comme l’affirme P. Waltz [6] et telle que l’a conçue le courant géopolitique anglo-saxon depuis les travaux de H. Mackinder qui, en 1919, en avait publié la première carte. Sur cette carte, la région de l’Europe orientale est sillonnée de deux lignes d’affrontement : l’une, symbolisée par le drapeau de contingents de l’armée de terre, est celle d’une puissance continentale venant du nord et/ou de l’est et essayant obtenir par la force un débouché sur la Méditerranée ; l’autre, symbolisée par l’ancre, est celle d’une puissance navale empêchant la « descente » de la première vers la mer [7]

Si ces puissances ne furent jamais les mêmes au cours de l’histoire, elles ont néanmoins toujours appartenu à deux groupes bien distincts : depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours, celles répondant à l’aspect géopolitique de la puissance continentale du Nord et/ou de l’Est faisaient partie du groupe portant les caractéristiques des régimes totalitaires et despotiques. Les autres, les puissances navales, ont toujours été des États démocratiques et libéraux (sinon au sens strict des termes, du moins par rapport aux puissances adverses). Ainsi, le diptyque « puissance continentale - puissance navale » se compose comme suit : 1 / l’Empire perse despotique face aux États grecs démocratiques pendant l’Antiquité ; 2 / l’Empire perse du haut Moyen Âge, remplacé par les États arabes depuis le VIIe siècle face à l’Empire romano-byzantin (lequel exerçait, jusqu’au Xe siècle, une politique de puissance navale) ; 3 / l’Empire byzantin du bas Moyen Âge (ayant opté depuis le XIe siècle en faveur d’une orientation géostratégique continentale), remplacé par l’Empire ottoman par la suite, face aux cités maritimes italiennes ; 4 / l’Empire russe face aux puissances navales occidentales (l’Angleterre en tête), ayant placé sous leur « tutelle stratégique » l’Empire ottoman depuis le XVIIIe siècle ; 5 / les deux Reich allemands (le deuxième, impérial, et le troisième, nazi) face aux mêmes puissances navales occidentales ; 6 / le pacte de Varsovie face à l’OTAN en plein milieu du XXe siècle.

Quoique cette approche méthodologique découle de plusieurs travaux anglo-saxons à contenu géopolitique (ou tout au moins « géohistorique »), le premier texte qui témoigne d’une réflexion approfondie sur la question sont les Mémoires de Napoléon Bonaparte. Ce texte, qui, selon G. Chaliand, reflète originellement une approche géopolitique de l’état des choses [8] compte parmi les dires et les maximes de l’empereur français recueillis par son ami le comte Las Cases qui avait suivi son chef de guerre en exil à Sainte-Hélène, et publiés après le retour de ce dernier en France, en 1823. Avec une lucidité remarquable, Napoléon y révèle la valeur géopolitique de l’espace russe et l’importance du Sud-Est européen dans la pensée stratégique occidentale par rapport, justement, à cette valeur géopolitique [9] « Les Anglais ont frémi de nous voir occuper l’Égypte. Nous montrions à l’Europe le vrai moyen de les priver de l’Inde. Ils ne sont pas encore bien rassurés ; et ils ont raison. Si 40 000 ou 50 000 familles européennes fixent jamais leur industrie, leurs lois et leur administration en Égypte, l’Inde sera aussitôt perdue pour les Anglais, bien plus encore par la force des choses que par celle des armes [...]. La Grèce, le Péloponnèse du moins, doit être le lot de la puissance européenne qui possédera l’Égypte. Ce devait être le nôtre. Et puis, au nord, un royaume indépendant, Constantinople avec ses provinces, pour servir comme de barrage à la puissance russe, ainsi qu’on a prétendu le faire à l’égard de la France, en créant le royaume de la Belgique. J’ai pu partager l’Empire turc avec la Russie ; il en a été plus d’une fois question entre nous. Constantinople l’a toujours sauvé. Cette capitale était le grand embarras, la vraie pierre d’achoppement. La Russie la voulait ; je ne devais pas l’accorder : c’est une clef trop précieuse ; elle vaut à elle seule un empire : celui qui la possédera peut gouverner le monde. »

Quoiqu’il ne fît jamais référence à ce texte de la pensée napoléonienne, le chef de file de l’école géopolitique anglo-saxonne, H. Mackinder, s’inscrivit exactement dans la même ligne de pensée géopolitique lorsqu’il élabora, à partir de 1904 [10] les concepts géopolitiques qui dominèrent la diplomatie de Londres et de Washington depuis lors, et continuent d’ailleurs de le faire jusqu’à nos jours.

Mackinder avait renoncé à l’identité de « géopoliticien », considérant que ce terme – inventé d’ailleurs par le Suédois Rudolf Kjellen pendant la Première Guerre mondiale [11] était mieux approprié pour désigner ses collègues allemands au service d’un régime absolu tel que le IIe Reich. Mais il a en réalité adapté la pensée napoléonienne à l’idée de base du fondateur de l’école géopolitique allemande Friedrich Ratzel [12] idée selon laquelle la carte mondiale ne doit pas être lue en termes de stratégie selon la projection Mercator, mais d’après la projection polaire (voire circulaire). Contrairement à la carte mondiale mercatorienne, qui, suivant la projection nord-sud, donne l’impression que la planète est nettement répartie en masses océaniques et continentales bien distinctes les unes des autres d’ouest en est (océan Pacifique - espace continental américain - océan Atlantique - espace eurafricain - océan Indien – espace asiatique), la projection polaire présente un monde circulaire où les masses continentales dans leur ensemble donnent l’impression d’une Île mondiale flottant sur un Océan mondial formé par l’ensemble des masses océaniques. Poussant son approche (émanant de l’empirisme anglais traditionnel et juxtaposée à une perspective quasi déterministe de l’Histoire), Mackinder avança l’idée de l’existence d’un « cœur eurasiatique » (Heartland) allant de l’Europe orientale jusqu’à la Sibérie orientale, dont le « tenant » aura la possibilité de s’imposer en superpuissance à toute l’humanité, à condition qu’à son avantage stratégique émanant de cette position géographique privilégiée vienne, un jour, s’ajouter la possibilité de l’accès « direct » à la mer.

Dans la formulation finale de cette idée devenue doctrine dans la politique anglo-saxonne, les tenants possibles du cœur eurasiatique sont au nombre de trois : 1 / la Russie, dont le territoire coïncide traditionnellement avec la région géographique du cœur eurasiatique ; 2 / l’Allemagne, qui a essayé de s’approprier l’espace russe, activant sa politique de poussée vers l’est pendant les deux guerres mondiales ; 3 / la Chine, bénéficiant d’une possibilité analogue de poussée vers le nord (éventuellement aussi sous l’impulsion ou le contrôle du Japon). Quant aux moyens stratégiques permettant l’accès direct à la mer (et cela notamment dans le cas de la Russie dont les côtes septentrionales se trouvent bloquées par la glace pendant la plus grande partie de l’année), ils sont les suivants : l’acquisition d’un haut degré de puissance maritime (navale à la limite) et le contrôle de l’un des trois points géographiques au moins à travers lesquels cet accès s’annonce possible (détroits de Corée, accès à la mer Baltique, Bosphore et Dardanelles). Ainsi, la formulation élaborée du concept anglo-saxon concernant l’architecture géopolitique de la planète finit par promouvoir l’espace géographique de la Question d’Orient comme l’un des trois points géostratégiques les plus vitaux du système international et l’associer étroitement aux questions relevées par le jeu de puissance tant au nord de l’Europe qu’en Extrême-Orient.

Cette approche nous permet justement de décoder l’ensemble des événements historiques du Sud-Est européen. Même si elle ne répond pas à toutes les questions soulevées par la recherche historique, elle fournit, du moins, une plate-forme méthodologique solide pour mettre en lumière le jeu des grandes et petites puissances qui s’y est déroulé.

II. DES GUERRES DES BALKANS AUX GUERRES MONDIALES : L’OUEST ET LE FACTEUR ALLEMAND

Lorsque H. Mackinder publiait sa première étude qui lui valut le titre de « fondateur » de l’école géopolitique anglo-saxonne, intitulée « The geographical pivot of history », parue dans le Geographical Journal de 1904, la Russie, tenant traditionnel du « Heartland », se retirait des Balkans, absorbée par des problèmes stratégiques sur sa frontière du Pacifique en raison de sa rivalité accrue avec l’Empire japonais, qui menaçait sérieusement la prépondérance géopolitique russe dans cette partie du globe. Londres, ayant conclu une alliance militaire avec Tokyo déjà depuis 1902, et ayant bloqué avec sa politique la flotte russe du Nord dans la mer Baltique et celle de la mer Noire au-delà des Dardanelles lors de la guerre russo-japonaise de 1905 [13] n’avait qu’à se réjouir de ce nouvel état des choses, voyant en la puissance japonaise un partenaire géopolitique grâce auquel l’ « encerclement » de la Russie serait désormais achevé sur l’ensemble de l’espace eurasiatique.

Mais, au même moment, l’espace balkanique gagnait en valeur géopolitique pour les dirigeants du IIe Reich allemand, l’empereur Guillaume II et l’amiral Alfred von Tirpitz, qui, ayant opté en faveur d’une politique à l’échelle mondiale [14] préparaient l’État allemand pour un affrontement direct avec les puissances navales traditionnelles, l’Angleterre en premier lieu [15] Leur projet stratégique comportait deux volets bien distincts et complémentaires à la fois. La création d’une puissante flotte de combat qui, selon von Tirpitz, devrait écraser la flotte britannique dans un combat décisif en mer du Nord, d’un côté, et la satellisation de l’Empire ottoman sur le territoire duquel la Deutsche Bank financerait la construction d’une voie ferrée allant jusqu’au golfe Persique, limite occidentale de l’espace colonial britannique de l’Asie centrale, de l’autre. Face à cette nouvelle réalité géopolitique, Londres et Paris fondèrent l’Entente cordiale à laquelle vint s’adjoindre, peu après, Saint-Pétersbourg.

La révolution jeune-turque n’a fait qu’accélérer, à partir de 1908, le cours des événements dans les Balkans. L’Autriche-Hongrie, alliée de l’Allemagne, annexa la Bosnie-Herzégovine qu’elle avait placée sous sa protection depuis le traité de Berlin en 1878. L’Italie attaqua l’Empire ottoman en Tripolitaine. La Bulgarie, la Grèce, la Serbie et le Monténégro considérèrent le moment venu d’accomplir leurs aspirations nationales [16] L’affaiblissement à la fois politique et militaire de l’Empire ottoman dû réciproquement aux luttes intestines ainsi qu’à la guerre contre l’Italie, en relation avec le regain d’intérêt de la Russie pour les Balkans, fut la cause principale de la décision de la Serbie, du Monténégro et de la Bulgarie de s’unir contre l’Empire ottoman dans une sorte d’ « alliance chrétienne ». La Grèce vint s’y joindre par le biais d’un accord bilatéral avec la Bulgarie conclu seulement après la pression exercée sur Sofia par Londres [17] qui – comme Paris d’ailleurs – voyait en la personne du président du Conseil Vénizélos le garant des intérêts géopolitiques de l’Ouest européen en Méditerranée orientale contre le facteur russo-slave. La première guerre balkanique (1912-1913) n’a fait que préparer la seconde (1913), toutes deux ayant revêtu l’aspect géopolitique d’une répétition générale des deux guerres mondiales sur les territoires chrétiens des Balkans du Sud.

Dans cette arène géopolitique, les facteurs ottoman/turc et roumain ne se trouvèrent pas à des distances tout à fait opposées. La Turquie, « cible » des États balkaniques du Sud durant la première guerre balkanique, se trouvait dans le camp anti-bulgare pendant la deuxième mais, subissant la même influence stratégique allemande que la Bulgarie pendant les deux guerres mondiales, elle a pris activement part aux conflits de 1914-1918 aux côtés des empires centraux et, pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a soutenu Berlin en exportant du chrome au profit de l’industrie lourde allemande et en contribuant à la politique de déstabilisation de l’URSS où vivaient les Tartares, considérés par le mouvement pan-turcique alors en vogue – et soutenu par les services de propagande hitlériens – comme frères de sang du peuple turc [18] En ce qui concerne la Roumanie, initialement amie mais par la suite adversaire du IIe Reich, puis, alliée du IIIe, ses options stratégiques étaient subordonnées non pas aux structures géopolitiques de l’arène méditerranéenne, mais à celles de la partie septentrionale des Balkans. La différence entre les deux réside en ceci : la Turquie, la Bulgarie, la Yougoslavie, l’Albanie et la Grèce appartiennent à cette partie de la péninsule Balkanique dont l’enjeu stratégique est conditionné par les données de l’architecture géopolitique de la Méditerranée. Tous ces États bénéficient (c’est le cas de la Turquie, de la Yougoslavie, de la Grèce et de l’Albanie) ou bien considèrent qu’ils « peuvent » bénéficier (dans le cas de la Bulgarie) d’un accès à la Méditerranée. La Roumanie, elle, en raison de sa situation géographique, ne participe pas – ou participe indirectement – à l’architecture géopolitique méditerranéenne, sa réalité géostratégique étant conditionnée par sa proximité avec l’espace russe [19] De 1890 à 1945, à l’exception de la période de la République de Weimar (1918-1933), les Balkans occupèrent une place de choix dans la planification de la « poussée vers l’est » (Drang nach Osten), fort influencée par les idées géopolitiques de F. Ratzel et, dans la suite, de celles de Karl Haushofer. S’appuyant sur Vienne en 1914-1918 et sur Rome en 1939-1943, Berlin essaya de combiner ses propres aspirations géopolitiques mondiales avec la promotion des intérêts de ses alliés régionaux. Quant au camp occidental, l’influence de la géopolitique sur le jeu du pouvoir ne fut pas à Paris la même qu’à Londres ou à Washington.

En effet, tandis que la politique française refusait avec persistance de laisser ses principes démocratiques et humanistes subir l’influence d’un esprit géopolitique réaliste et cynique (le représentant par excellence de la pensée géopolitique française, Jacques Ancel, prêchait une vision plutôt humaniste de la conception des frontières), il n’en fut pas de même avec le monde anglo-saxon. Ainsi, bien avant la Première Guerre mondiale et la formulation finale du système géopolitique mackindérien, l’amiral américain A. T. Mahan, fondateur de la théorie du « navalisme » grâce à laquelle les États-Unis entrèrent dynamiquement dans le jeu géopolitique international, prévenait les centres de prise de décisions politiques de Washington et de Londres sur les visions autrichiennes dans la péninsule Balkanique en ces termes [20]  « Dans la partie sud-est de l’Europe, par suite de la faiblesse de la Turquie, il y a des régions où l’on trouve beaucoup de conditions qui se rencontrent d’habitude uniquement dans les pays lointains accessibles seulement grâce à la marine. Aussi, tandis que le bouleversement politique de la Turquie lui en donnait l’occasion et le prétexte, l’Autriche consolida son pouvoir dans une position stratégique qui, pour n’en citer que les moindres avantages, la fait pénétrer plus avant vers la mer Égée, chose tout à fait désirable, en vue du futur développement de son commerce. »

En ce qui concerne la Seconde Guerre mondiale, l’allié de l’Allemagne axé sur l’espace européen du Sud-est était l’Italie qui, depuis les années 1910, avait lancé sa politique d’expansion dans le bassin oriental de la Méditerranée. Ayant arraché de l’Empire ottoman la Tripolitaine et le Dodécanèse, elle joua un rôle considérable (avec l’appui de Vienne) dans la création de l’État albanais comme contrepoids à la présence grecque et – surtout – serbe avec laquelle elle rivalisait pour le contrôle de l’Adriatique. Elle se mêla par la suite, pendant une courte période, aux affaires de l’Asie Mineure, puis occupa l’île de Corfou qu’elle quitta aussitôt sous la pression de la Société des nations, annexa l’Albanie et attaqua sans succès la Grèce en 1940, pour être vite défaite dans le massif du Pinde. Elle obligea ainsi son alliée à intervenir par la force dans le Sud-Est européen, ce qui entraîna un retard considérable quant au déclenchement de l’attaque nazie aux dépens de l’URSS.

L’analyse la plus complète sur la structure géopolitique balkanique, inscrite dans un cadre plus large de sécurité de l’Ouest, nous est fournie par Mackinder en personne, dans son ouvrage considéré jusqu’à nos jours comme « la bible de la géopolitique » et publié au lendemain de la Première Guerre mondiale sous le titre Democratic Ideals and Reality [21]Partant de l’idée ratzelienne de l’Île mondiale flottant sur un Océan mondial, Mackinder a prolongé la conception napoléonienne, exposée ci-dessus, de l’espace russe comme facteur prépondérant de l’architecture géostratégique en Europe (Heartland) et, par là même, dans le monde entier. Tirant également profit de sa fonction de député à la Chambre des Communes, il a conseillé aux puissances navales occidentales, voire anglo-saxonnes, d’établir un système de paix fondé sur le contrôle absolu de l’espace tout au moins littoral sud-est-européen, de l’Adriatique à la mer Égée. Une Grande Yougoslavie et surtout une Grande Grèce, cultivant soigneusement des liens stratégiques étroits avec l’Occident, seraient les garants du bon fonctionnement de cet appareil géopolitique, empêchant, d’une part, l’accès à la Méditerranée aux puissances continentales du Nord (Russie ou Allemagne), permettant, de l’autre, le contrôle des voies maritimes de l’Europe vers l’océan Indien via le canal de Suez.

Acquis par les idées de Mackinder, David Lloyd-George justifiait ainsi la décision de son gouvernement de soutenir les Grecs dans leur campagne en Asie Mineure en 1919-1922 :

« Les Grecs sont des marins renommés. Ils développeront la force navale. Ils posséderont les îles les plus importantes de la Méditerranée orientale. Ces îles deviendront la base pour nos sous-marins du futur. Ces îles protègent les flancs de nos communications à travers le canal de Suez, au Moyen-Orient et au continent australien. Les Grecs se distinguent d’un haut sentiment de gratitude et si nous sommes des amis fidèles de la Grèce pendant la période de son expansion nationale, celle-ci deviendra un moyen de sécurité, grâce auquel les lignes de transport et de communications intérieures de l’Empire britannique se maintiendront. » [22]

À noter ici que ce concept d’espaces territoriaux d’autres nations souveraines, considérés comme partie intégrante de l’espace stratégique « intérieur » de l’Empire britannique, est omniprésent de nos jours dans les publications officielles de la Maison-Blanche américaine (depuis l’administration Clinton) dans lesquelles la politique d’intervention même militaire des États-Unis sur l’ensemble de la planète est qualifiée de « US National Security Policy ».

Dans une perspective géostratégique, les événements de la Seconde Guerre mondiale semblent bien inscrits dans les grandes lignes de la conception géopolitique mackinderienne ci-dessus : le général Ioannis Metaxas, quoiqu’il comptât parmi les admirateurs du régime hitlérien, mais reconnaissant la suprématie géostratégique du monde anglo-saxon [23] maintint la Grèce dans le camp occidental. Il en fut de même avec la Yougoslavie, où les forces politiques pronazies ne réussirent pas à faire basculer le pays dans le camp hitlérien. Quant à la Turquie, qui, dans l’entre-deux-guerres, essaya de se transformer en république de type pro-occidental sous l’impulsion de Kemal Ataturk, elle fut maintenue par la diplomatie britannique en dehors du camp de l’Axe, le gouvernement turc étant obligé par Londres de limiter ses sentiments pro-allemands à la seule exportation à destination de l’Allemagne du chrome, indispensable pour l’industrie lourde hitlérienne.

 

 

Notes
  • [1] Dans cette étude nous entreprenons l’application dans le domaine de l’histoire du Sud-Est européenne, depuis le début du XXe siècle jusqu’à nos jours, des idées d’ordre géopolitique exprimées dans nos études « La Question d’Orient. Points de vue géopolitiques anciens et nouveaux (de l’effondrement de l’Empire ottoman à la perte française de l’Afrique subsaharienne) », Guerres mondiales et conflits contemporains, no 192, 1998, p. 167-182, et « La géopolitique de la Méditerranée orientale pendant la guerre froide », Relations internationales, no 109, printemps 2002, p. 83-97.
  • [2] É. Driault, Histoire diplomatique de la Grèce, Paris, PUF, vol. 1, p. 187-194. Sur le sujet voir aussi I. Loucas, « La Question d’Orient. Points de vue géopolitiques anciens et nouveaux (de l’effondrement de l’Empire ottoman à la perte française de l’Afrique subsaharienne) », Guerres mondiales et conflits contemporains, no 192, 1998, p. 167-182.
  • [3] É. Driault, La Question d’Orient, Paris, F. Alcan, 1898.
  • [4] Voir par exemple M. Anderson, The Eastern Question. 1774-1923, London, McMillan, 1966.
  • [5] S. Yerassimos, v. « Orient (Question d’) », in Y. Lacoste (éd.), Dictionnaire de géopolitique, Paris, Flammarion, 1995, p. 1157.
  • [6] P. Waltz, La Question d’Orient dans l’Antiquité, Paris, Payot, 1942, p. 36-37 et 360-363.
  • [7] H. Mackinder, Democratic Ideals and Reality. A Classical Work on Geography and World Power, New York, The Norton Library, 1919 (1966), p. 108, fig. 25.
  • [8] G. Chaliand, Anthologie mondiale de la stratégie. Des origines au nucléaire, Paris, R. Laffont, 1990, p. 788 : l’auteur intitule justement la présentation de la pensée de l’empereur français : « Napoléon et la géopolitique ».
  • [9] Las Cases, « Mémorial de Sainte-Hélène », Las Cases, Gourgaud, Montholon, Bertrand, Napoléon à Sainte-Hélène, textes préfacés, choisis et commentées par J. Tulard, R. Laffont, coll. « Bouquins », 1981. Cité aussi par G. Chaliand, op. cit., p. 789.
  • [10] H. Mackinder, « The geographical pivot of history », Geographical Journal, vol. 24 (1904), p. 421-437.
  • [11] R. Kjellen, Der Staat als Lebensform, Leipzig, 1917.
  • [12] Voir notamment sa Géographie politique, parue en 1897 et traduite en français par F. Ewald (F. Ratzel, La géographie politique : les concepts fondamentaux, Paris, Librairie A. Fayard, 1987), dont les idées concernant l’Île et l’Océan mondiaux sont citées par G. Chaliand, op. cit., p. 949-954.
  • [13] Voir e.a. E. B. Potter (ed.), Sea Power. A Naval History, Annapolis, Naval Institute Press, 1981, p. 168-174.
  • [14] Voir M. Sheehan, The Balance of Power. History & Theory, London-New York, Routledge, 1996, p. 133-138.
  • [15] Voir notamment F.-E. Brezet, « La pensée navale allemande des origines à 1914 », in H. Coutau-Bégarie (éd.), L’évolution de la pensée navale, Paris, Commission française d’histoire maritime - Fondation pour les études de défense nationale, Paris, 1990, p. 119-134.
  • [16] Pour les événements politiques survenus dans l’Empire ottoman et les autres pays du système méditerranéen après la révolution des Jeunes-Turcs, voir d’une façon générale R. Mantran (éd.), Histoire de l’Empire ottoman, Paris, Fayard, 1989, p. 577-603.
  • [17] Voir l’étude de K. Svolopoulos, Vénizélos, Baucher et l´idée de l´Alliance balkanique (en grec), Athènes, 1975.
  • [18] Voir notamment F. Weber, Le neutre habile (trad. grecque), Athènes, Thetili, 1985.
  • [19] Voir aussi l’approche de P. Otu, « Romanians and the Eastern Question. Geopolitical aspects », Romanian Review of Military History, Romanian-Hellenic Special Issue, 2001, p. 71-80.
  • [20] A.-T. Mahan, dans Mahan et la maîtrise de la mer, textes choisis et présentés par P. Naville, Paris, Berger-Levrault, 1981, cité par G. Chaliand, op. cit., p. 959. Sur le sujet, voir aussi M. Vego, Austro-Hungarian Naval Policy. 1904-1914, London, Frank Cass, 1996. Sur Mahan et le navalisme, voir entre autres B. Colson, « Jomini, Mahan et les origines de la stratégie maritime américaine », in H. Coutau-Bégarie (éd.), L’évolution de la pensée navale, op. cit., p. 135-152.
  • [21] H. Mackinder, Democratic Ideals..., op. cit.
  • [22] Cité par A. Diamantopoulos, « La connexion des sociologues au char de Vénizélos » (en grec), Alexandros Papanastassiou, Athènes, Polytypo, 1987, p. 125-170.
  • [23] Voir I. Loucas, « La pensée navale grecque contemporaine », H. Coutau-Bégarie (éd.), L’évolution de la pensée navale, VII, Paris, Institut de stratégie comparée, 1998, p. 168-171.
III. DE LA GUERRE FROIDE A NOS JOURS : L’OCCIDENT ET LE FACTEUR RUSSE

Avec la fin de la Seconde Guerre mondiale et le début de la guerre froide, l’espace européen du Sud-Est fut divisé en deux parties, chacune appartenant à un système géopolitique eurasiatique plus large. Derrière la lutte idéologique entre capitalisme libéral et communisme travailliste, on trouve la même réalité géopolitique qui constituait depuis les temps modernes le fondement même de la Question d’Orient.

En effet, la zone russe – identifiée au pacte de Varsovie – comprenant la Roumanie et la Bulgarie (l’Albanie et la Yougoslavie s’étant échappés respectivement vers la Chine maoïste et vers le groupe des pays non-alignés), l’Occident s’assura la présence de la Grèce et de la Turquie dans un système mondial de défense [24] qui s’étendait sur toute la zone eurasiatique, de la Scandinavie au Japon. Cette zone n’était que la réalisation de ce que le géopoliticien américain N. Spykman avait appelé en 1944 « Rimland », le cordon sanitaire qui devait assurer l’encerclement du facteur russe/soviétique de la Baltique à la mer du Japon [25]

La partie européenne de ce cordon sanitaire constituait le territoire de l’OTAN, dont le flanc sud-est fut activé pendant la guerre de Corée (la Grèce et la Turquie y participèrent avec l’envoi de troupes). Mais l’idée pour la création de l’OTAN avait été lancée déjà bien avant, en 1943, au moment où les forces nazies commençaient à perdre la guerre dans les steppes soviétiques, lorsque H. Mackinder annonça dans un article de la revue Foreign Affairs la future création de l’Alliance atlantique démontrant la nécessité pour l’Ouest – la victoire des Alliés était à l’époque fort plausible – de se doter d’une alliance puissante entre les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni et la France contre le danger qu’allait représenter après la guerre la toute-puissante URSS.

Mackinder reprenait alors son ancienne idée sur l’importance stratégique du Heartland ( « État pivot »  et mettait à nouveau l’accent sur le fait que « le bouleversement de l’équilibre des puissances en faveur du Heartland, avec son expansion sur les terres marginales de l’Eurasie, permettait l’utilisation de vastes ressources continentales pour la construction navale, et l’empire du monde serait alors en vue » [26]

La création de l’OTAN en 1949 n’était donc que l’achèvement, au niveau de la matérialisation militaire et politique, de l’idée géopolitique mackinderienne de 1943. Et l’adhésion à l’alliance euro-atlantique – en 1952 – de la Grèce et de la Turquie (la première occupant l’extrémité sud-orientale de l’espace européen et la seconde l’extrémité occidentale de l’espace asiatique) fut le résultat de l’adoption totale, par les centres de prise de décisions de l’Ouest, de l’importance du cordon sanitaire lequel, très vite, se prolongera vers l’est avec la constitution du pacte de Bagdad. La chaîne géopolitique occidentale fut prolongée plus à l’est encore par la création de l’OTASE. Avec la participation dans ce système de défense du Japon et de la Corée du Sud s’achevait la création du cordon sanitaire autour de l’espace soviétique [27]

Le degré d’insertion de l’espace balkanique du Sud dans le cadre géopolitique de la Question d’Orient à l’ère de l’OTAN se révéla encore plus après la fin de la guerre froide lorsque, bien que le communisme ne constituât plus un danger pour l’Occident, l’OTAN non seulement ne se disloqua pas, mais, tout au contraire, continua à exercer sa pression stratégique sur Moscou. En effet, le « Nouveau concept stratégique » de l’alliance signée à Rome en novembre 1991, à l’occasion duquel les fondements de l’OTAN de l’après-guerre froide furent définis, précisait bien (art. 14) que, même dans une relation non hostile et dans une relation de collaboration, le potentiel militaire et la concentration d’effectifs de l’ex-Union soviétique, y compris sa dimension nucléaire, demeuraient toujours le facteur le plus important dont l’alliance devrait tenir compte dans le maintien de l’équilibre stratégique en Europe. Le cadre géostratégique de concrétisation de ce concept a été systématiquement mis en place dans le cas de la Yougoslavie [28] un État qui, à l’exception de la période de la guerre froide où les ambitions politiques de son leader Tito n’avaient point coïncidé avec le système soviétique, fut, dans toute son histoire moderne et contemporaine, le pays par excellence russophile parmi tous les pays européens du Sud-Est [29]

Ainsi que nous le confiait encore récemment un ambassadeur yougoslave, la guerre de la dislocation de son pays commença aussitôt après que Slobodan Milosevic opposa son refus à la demande des États-Unis de leur céder des bases tout en expliquant gentiment au secrétaire d’État Eagleberger les raisons de son refus : il envisageait tout bonnement d’accorder aux Russes des facilités militaires sur la côte Adriatique. Par ailleurs, c’est dans les manigances stratégiques menées pendant cette guerre que l’on devrait chercher l’explosion à nouveau du nationalisme albanais, rendu vite incontrôlable à la suite de l’aide occidentale à destination de l’UCK tout en tenant compte, par la même occasion, des particularités sociopolitiques et économiques de ce phénomène dans un pays longtemps isolé et politiquement arriéré comme c’est le cas de l’Albanie.

À noter également que la dislocation de l’État yougoslave, par rapport à l’explosion du nationalisme albanais menaçant même l’intégrité territoriale de l’ex-République yougoslave de la Macédoine (FYROM), découle des desseins géopolitiques traditionnels de deux puissances européennes, l’Allemagne et l’Italie. Ainsi, Berlin, dans la lignée du processus de la Réunification, se félicita de voir la Croatie et la Slovénie en train de se dégager de l’influence de Belgrade. De son coté, Rome, avec l’appui, sans doute, du Vatican, soucieux de la prédominance des Serbes orthodoxes sur les Croates et Slovènes catholiques, en profita pour renforcer la position stratégique de l’Albanie. Ce qui explique que le gouvernement d’Athènes, quoiqu’il assumât respectueusement toutes ses responsabilités vis-à-vis de l’OTAN, n’ait pas manqué de porter une aide stratégique discrète à son homologue de Belgrade, comme le fit, par ailleurs, Paris, dans une moindre mesure et d’une façon différente il est vrai.

Grande ironie du sort, la dislocation de la Yougoslavie a nécessité la collaboration de l’Occident avec le facteur islamique fondamentaliste, dans la mesure où elle permit à des organisations fondamentalistes appuyées par l’Iran, la Syrie et al-Qaida, de soutenir activement les combattants bosniaques musulmans et les troupes de l’UCK albanais ! Faute d’autres témoignages, nous faisons ici appel à notre propre expérience d’observateur dans le cadre de la réunion des pays islamiques sur la question de Kosovo à Téhéran en 1999, au cours de laquelle des leaders politiques nationalistes albanais, suivis par le grand mufti de Bosnie-Herzégovine, exprimèrent leur gratitude aux frères Moudjahiddines, membres du Hezbollah et d’autres groupes fondamentalistes, pour le soutien militaire accordé à l’UCK et aux Bosniaques musulmans sous la tolérance, sinon l’appui, des forces de l’OTAN [30]

Quoi qu’il en soit, revenant sur l’approche géopolitique de la Question d’Orient, ce n’est qu’au lendemain du démantèlement de la Yougoslavie que l’OTAN finit par estimer que la Russie ne constituait plus aucun danger ! Peu de temps après, en avril 1999, au cours de la signature du nouveau Concept stratégique de l’Alliance à l’occasion de la célébration de son 50e anniversaire à Washington, la Russie fut enfin considérée comme un partenaire potentiel du nouveau système eurasiatique – sous tutelle occidentale – de sécurité. L’étape suivante dans le contexte du rapprochement entre l’Occident et la Russie fut la création et la mise en valeur du Conseil OTAN-Russie, après que les États-Unis, heurtés sauvagement par les événements du 11 septembre 2001, eurent considéré que leur guerre anti-terroriste offrait une plate-forme de convergence stratégique avec Moscou qui avait, depuis les années 1990, lancé sa propre guerre contre le terrorisme islamique fondamentaliste en Tchétchénie.

Il faut reconnaître que craintes et inquiétudes de l’Occident, qui l’ont conduit jusqu’à la dislocation d’une Yougoslavie alliée de la Russie dans le nouveau système international, ne manquaient pas de fondements géopolitiques. La convergence stratégique de Belgrade avec Moscou du début des années 1990 ne pouvait être abordée séparément du fait que, depuis 1992, et surtout avec le décret présidentiel 1300 du 17 décembre 1997 (revu et augmenté après la dislocation de Yougoslavie, en janvier 2000) [31] la Russie a revu sa doctrine militaire et fait connaître sa décision de se servir de son arsenal nucléaire, même en cas de menace conventionnelle. À cela faudra-t-il ajouter le renouveau des visions géopolitiques eurasianiennes signalé au sein des élites russes [32] et qui, dans un contexte plus propice, pourraient refaire de la Russie une menace de premier ordre pour la sécurité du Sud-Est européen, telle qu’elle est conçue par la stratégie anglo-saxonne. C’est, d’ailleurs, dans ce sens que fut lancé l’avertissement dans les pages de Foreign Affairs – cette même revue qui avait fait connaître le concept mackinderien pour la création de l’alliance euro-atlantique en 1943 – peu de temps avant que les forces de l’OTAN n’interviennent en Yougoslavie, par Charles Clover, directeur du bureau du Financial Times en Ukraine, État considéré désormais par l’Occident comme la « porte stratégique » vers l’espace russe [33]

Au lendemain de la dislocation de la Yougoslavie, cette porte était grande ouverte pour la réalisation de l’ambition géopolitique de Mackinder (voir, dans le cadre de la Question d’Orient, l’espace stratégique des forces navales occidentales s’étendre depuis la Crète jusqu’à l’ensemble de la mer Noire). Avec l’élargissement récent de l’OTAN, la Bulgarie et la Roumanie font désormais partie du noyau dur de l’Alliance, dont la sphère d’influence comprend aussi l’Ukraine et les républiques du Caucase en tant que membres de l’organisme « Participation pour la Paix » auquel appartient aussi la Russie.

  • [24] Sur l’aspect géopolitique de l’adhésion de la Grèce et de la Turquie à l’OTAN, voir I. Loucas, « Le système géopolitique de la Méditerranée orientale et l’OTAN pendant la guerre froide », Actes du XXVe Congrès international d’histoire militaire : Les alliances militaires depuis 1945, Bruxelles, Centre d’histoire militaire, Travaux 33, 2000, p. 329-336.
  • [25] N. Spykman, The Geography of the Peace, New York, Harcourt & Brace, 1944. Voir aussi G. Chaliand, op. cit., p. 1236-1243.
  • [26] H. Mackinder, « The round world and the winning of the peace », Foreign Affairs, vol. 21, July 1943, p. 595-605. Voir aussi G. Chaliand, op. cit., p. 1041-1045, d’où la traduction française citée.
  • [27] G. Chaliand et J.-P. Rageaud, Strategic Atlas, New York, Penguin Books, 1985, p. 25.
  • [28] Une partie des idées ci-dessous sont élaborées d’après notre étude « La géopolitique de la Méditerranée orientale pendant la guerre froide », Relations internationales, no 109, printemps 2002, p. 83-97.
  • [29] Voir aussi I. Loucas, « The new geopolitics of the Balkans », N. Kovalsky (ed.), European Union - Russia : Balkan Situation, Moscow, Russian Academy of Sciences - Inderdialect, 2000.
  • [30] Nous avons publié un rapport sur cette Réunion islamique de Téhéran dans la revue Geopolitiki (Athènes), décembre 2000, p. 8-10.
  • [31] Voir e.a. O. Koulieri, « Russian eurasianism and the geopolitics of the Black Sea », M. Sheehan, Security Dynamics in the Black Sea, University of Aberdeen - Scottish Center for International Security, 2000, p. 10-17.
  • [32] Voir J.-C. Romer, « La géopolitique en Russie : entre Europe et Asie », Relations internationales, no 109, printemps 2002, p. 69-82.
  • [33] C. Clover, « Dreams of the Eurasian heartland », Foreign Affairs, march-april 1999.

Mis en ligne sur Cairn.info le 01/12/2008

https://doi.org/10.3917/gmcc.217.0017

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